Développer la filière électrique québécoise

On parle d’une grosse annonce quand deux premiers ministres se réunissent pour la faire. Justin Trudeau et François Legault se sont rendus à l’usine de fabrication d’autobus scolaires et de camions 100 % électriques de la Compagnie Électrique Lion, lundi, pour annoncer un investissement de 100 millions de dollars pour la construction d’une usine d’assemblage de batteries pour véhicules électriques.

Une telle annonce tombe sous le sens. Le Québec est dans une position exceptionnelle pour devenir un chef de file mondial de l’électrification des transports lourds. Le Québec produit de l’électricité et, surtout, de l’hydroélectricité propre et renouvelable. En plus, le Québec possède des mines de lithium. À une époque où il faut penser à bâtir une économie verte, l’annonce ne pouvait pas mieux tomber.

L’usine sera construite au cours des prochains mois et devrait débuter ses opérations au début de 2023. Elle produira des modules et des ensembles de batteries à partir de cellules Lithium-ion. La construction de cette usine devrait débuter au cours des prochains mois et son emplacement sera divulgué sous peu.

Ce projet représente un investissement total d’environ 185 M$. Lion prévoit ainsi réduire considérablement le coût de ses véhicules tout en assurant le contrôle d’une composante clé de sa chaîne d’approvisionnement. Les batteries peuvent compter pour 30 % à 40 % du coût d’un véhicule électrique.

Lion sera en mesure de produire un module toutes les 11 secondes et un ensemble de batteries toutes les cinq minutes, représentant une capacité totale de 5 gigawatt-heure permettant d’électrifier quelque 14 000 véhicules par année.

La capacité de production actuelle de l’usine d’assemblage d’autobus et de camions de Lion, à Saint-Jérôme, est des 2 500 véhicules par année. L’usine de batteries offrira donc une bonne marge de manœuvre pour la croissance de Lion.

J’ai demandé à Lion combien de batteries seront fabriquées au début de la production et par la suite, et quelle proportion ira aux autobus et aux camions. «C’est difficile à dire pour le moment. On va y aller avec notre carnet de commandes», m’a répondu Patrick Gervais, vice-président, Marketing et communications pour Lion.

Lion prévoit bâtir une usine d’assemblage aux États-Unis et nous a confirmé que cette usine serait alimentée avec des batteries du Québec. Avec une telle capacité, Lion pourrait-elle vendre des batteries à d’autres manufacturiers? « Pas à court terme, mais nous pourrions éventuellement vendre des batteries pour d’autres applications», nous a indiqué M. Gervais.

Lion n’a pas chômé au cours des derniers mois. En début d’année, le fabricant a annoncé la signature d’une entente de distribution avec FLO, un important réseau nord-américain de bornes de recharge pour véhicules électriques. Toujours au début de l’année, Amazon s’est dit disposée à acheter quelque 10 000 camions électriques à Lion d’ici 2030.

À la fin de 2020, Lion a conclu un accord de revendeur avec ChargePoint, l’un des principaux réseaux de recharge de véhicules électriques au monde; a annoncé son intention de fusionner avec Northern Genesis Acquisition Corp., une société d’acquisition à vocation spécifique cotée en bourse; et a conclu une entente avec ABB pour son matériel de recharge.

Et ce n’est un secret pour personne que la prochaine étape importante pour Lion sera de faire son entrée en bourse.

Pour revenir un peu sur le lithium, un entrepreneur québécois, Benoit Couture, a fait preuve de vision en 2018 en fondant Recyclage Lithion.

L’entreprise a mis au point un procédé pour le recyclage des batteries lithium-ion, les plus utilisées actuellement dans le marché des voitures électriques et des appareils électroniques portables.

Ce procédé permettrait de récupérer jusqu’à 95 % des constituants des batteries et de les purifier à un grade qui permettra leur utilisation par les fabricants de batteries. Le procédé constituerait donc un moyen concret pour fermer la boucle du cycle de vie des batteries.

Un mot en terminant sur Développement Effenco, une entreprise québécoise spécialisée dans la conception de systèmes de propulsion électriques pour véhicules lourds spécialisés, dont on entend parler depuis quelques années. La compagnie a annoncé la mise en marché d’une première solution 100 % électrique offerte au même prix d’achat que les alternatives au diesel.

La spécialité d’Effenco, ce sont les véhicules qui parcourent des circuits similaires et font beaucoup d’arrêts-départs. On pense notamment aux camions de collecte des ordures et aux autobus. Et sa particularité, c’est de faire appel à des supercondensateurs qui permettent, ni plus ni moins, de recharger les camions durant leurs parcours, un peu comme par induction.

Les bornes sont sans fil et rechargent les supercondensateurs très rapidement. Le nombre de stations de recharge dépend de plusieurs facteurs, dont la longueur du circuit et le nombre d’arrêts. Des algorithmes d’intelligence artificielle permettent d’optimiser l’énergie à bord.

Il sera intéressant de surveiller les prochaines avancées québécoises en matière d’électrification du transport par camion. N’oubliez pas que TM4 et Nordresa sont des entreprises de Boucherville et Laval respectivement.

Steve Bouchard

Rédacteur en chef, transportroutier.ca

Steve Bouchard écrit sur le camionnage depuis près de 30 ans, ce qui en fait de loin le journaliste le plus expérimenté dans le domaine au Québec. Steve est le rédacteur en chef de l’influent magazine Transport Routier, publié par Newcom Média Québec, depuis sa création en 2000. Il est aussi le rédacteur en chef du site web transportroutier.ca et il contribue aux magazines Today’s Trucking et Truck News.

Steve rédige aussi le bulletin électronique de Transport Routier, Les nouveautés du routier, et il participe à l’élaboration des stratégies de communication pour le salon ExpoCam de Montréal, propriété de Newcom.

Steve est détenteur d’un permis de conduire de classe 1 depuis 2004 et il est le seul journaliste de camionnage au Québec à avoir gagné des prix Kenneth R. Wilson de la Presse spécialisée du Canada, l’or et l’argent deux fois chacun.

Steve a occupé la présidence et la présidence du Conseil du Club des professionnels du transport du Québec et il représente les médias au comité des fournisseurs de l’Association du camionnage du Québec. En 2011, il a reçu le prestigieux prix «Amélioration de l’image de l’industrie» remis par l’Association du camionnage du Québec.