Les régulateurs passent au niveau supérieur

Les régulateurs de vitesse avancés peuvent faire économiser du carburant. Si les chauffeurs savent en utiliser toutes les fonctionnalités.

Au tout début, réguler la vitesse signifiait tirer sur le câble relié à l’accélérateur mécanique et à le verrouiller en position. Bien qu’il s’agisse d’une pratique rudimentaire et aucunement recommandée, cela réglait le moteur à un régime donné et permettait au camion de rouler à une vitesse donnée sur un terrain plat. Le régulateur de vitesse moderne fonctionne essentiellement de la même manière, mais dispose comme avantages électroniques supplémentaires. À certains égards, cependant, le régulateur de vitesse moderne présente  toujours certaines des mêmes limites que le verrouillage de l’accélérateur.

Le régulateur de vitesse est pratique pour les chauffeurs, et c’est un moyen facile de maintenir une certaine vitesse sur un terrain plat. Les premières versions du régulateur de vitesse électronique faisaient exactement cela. On le réglait à 100 km/h, et c’est la vitesse que le camion gardait, ou essayait de garder. Si vous commenciez à gravir une pente, ou si vous rencontriez un vent contraire, l’ordinateur ouvrait la pompe, acheminant plus de carburant, peu importe la quantité nécessaire pour maintenir la vitesse définie. Il n’y avait rien de bien subtil là-dedans. Sa mission était de maintenir la vitesse définie. Point à la ligne.

Cela signifie que le moteur passait souvent, par exemple, d’une charge de 70 % à la vitesse définie à une charge de 100 % en s’engageant dans une pente. Cela n’aurait pas vraiment d’importance si le moteur avait maintenu une puissance de 70 % et que la vitesse avait été réduite à 90 km/h, mais la programmation des débuts était incapable de discrimination. La situation empirait au sommet de la pente.

Le régulateur de vitesse, comme si sa vie en dépendait, maintenait la puissance du moteur à 100 % jusqu’à ce que le camion atteigne à nouveau la vitesse définie, c’est-à-dire qu’il franchissait le sommet de la colline et descendait de l’autre côté, l’accélérateur à fond. Et lorsque le camion atteignait la vitesse définie, le frein moteur était souvent enclenché. En quelques mètres, vous passiez de la pleine puissance au ralenti, et ensuite le frein moteur devait réduire la vitesse que vous veniez d’atteindre en brûlant beaucoup de carburant. Le régulateur de vitesse, à ce titre, n’a pas fait grand-chose pour économiser du carburant.

Certains régulateurs de vitesse modernes fonctionnent toujours de la même manière, mais ils sont tempérés dans une certaine mesure par des paramètres du moteur appelés «statisme».

Le statisme permet une légère variation de la vitesse sur route sans une réponse instantanée de la pompe à carburant. Par exemple, si le statisme inférieur est réglé à 5 km/h sous la vitesse définie (100 km/h), l’ordinateur n’activera pas l’accélérateur tant que la vitesse du véhicule ne sera pas descendue à 95 km/h. La même chose s’applique à un paramètre de statisme supérieur : le frein moteur ne sera pas activé tant que la vitesse sur route n’aura pas atteint 105 km/h. Les paramètres de statisme varient selon la marque du moteur et sont généralement des paramètres programmables par l’utilisateur, allant de 2 à 8 km/h.

Certains fabricants de camions offrent encore ce régulateur de vitesse de base en option, et il est toujours populaire auprès de certaines flottes de transport lourd qui se soucient davantage du maintien de la vitesse sur route que des économies de carburant.

Le statisme ajoute une marge au-dessus et en dessous de la vitesse définie pour économiser du carburant lors de l’ascension d’une colline, et pour préserver la vitesse du véhicule lors de la descente de l’autre côté. Le statisme fait toujours partie des paramètres de la vitesse sur route et du régulateur de vitesse, mais cela fait maintenant partie d’un système beaucoup plus sophistiqué qui répond à des dizaines de facteurs externes.

 Régulateur de vitesse prédictif

Il y a beaucoup plus à dire sur le régulateur de vitesse que ce que je viens de décrire ici. Dans la plupart des cas, les systèmes de régulation de vitesse plus récents peuvent contrôler le couple moteur pour fournir une puissance supplémentaire lors de l’ascension à des régimes moteurs inférieurs, ce qui pourrait empêcher une rétrogradation par rapport à un système de régulation de vitesse d’il y a seulement quelques années. La nouvelle technologie à surveiller en matière de régulation de vitesse s’appelle le régulateur de vitesse prédictif. Comme son nom l’indique, le système peut «voir» la route devant et prévoir ce que le moteur doit faire pour monter ou descendre une colline le plus efficacement possible.

«Le régulateur de vitesse standard fonctionne mieux sur des routes droites et plates, où maintenir une vitesse constante était la fonction principale. Le régulateur de vitesse prédictif, par ailleurs, offre le meilleur rendement dans les collines où le chauffeur ne peut pas nécessairement voir ce qu’il y a au-delà de la prochaine colline ou du prochain virage», explique Peter Blonde, directeur de la commercialisation des produits pour l’efficacité du carburant et des transports pour Volvo.

Le régulateur de vitesse prédictif associe un récepteur GPS sur le véhicule à des cartes embarquées, puis ajuste la vitesse du véhicule pour offrir une économie de carburant optimale en fonction de sa lecture de la route devant. Par exemple, sur un terrain plat à l’approche d’une colline, le régulateur de vitesse prédictif peut faire accélérer légèrement le camion afin de gagner un peu d’élan pour la montée s’il s’agit d’une longue colline, ou il pourrait laisser le camion ralentir légèrement en gravissant une petite colline, car il sait qu’il va gagner un peu de vitesse en redescendant, maintenant une vitesse moyenne sur la colline sans compromettre le temps du trajet. En d’autres termes, ralentissez de 10 km/h en montant et gagnez 10 km/h en descendant. Tout finit par s’arranger.

«Contrairement au régulateur de vitesse standard, qui maintient une vitesse définie peu importe le terrain, lorsqu’un camion s’aventure sur certains types de terrain, comme des collines, le système prédictif module la vitesse de croisière en fonction de la géographie environnante», explique Kurt Swihart, directeur marketing chez Kenworth. «Par exemple, le régulateur de vitesse prédictif de Kenworth maintiendra la vitesse sur terrain plat en prévision d’une pente imminente. Alors que le camion monte et gravit une colline, le système permet au Kenworth T680 de réduire légèrement sa vitesse en dessous de la vitesse de croisière définie, ce qui est un moyen efficace d’améliorer l’efficacité énergétique.»

Une autre différence fondamentale entre un régulateur de vitesse standard et un régulateur de vitesse prédictif, c’est l’agressivité de l’accélération et du freinage.

«Un logiciel est configuré pour faire accélérer et ralentir le véhicule en douceur, afin de maximiser l’économie de carburant et la satisfaction du chauffeur», indique Jim Nachtman, directeur marketing poids lourds chez Navistar. «En fonctionnant le chauffeur le prévoit, celui-ci est susceptible d’utiliser le régulateur de vitesse plus souvent, ce qui améliore davantage l’économie de carburant.»

«Le système de régulation de vitesse prédictif d’International Truck dispose de paramètres programmables, réglables par la flotte, qui contrôlent les variations de vitesse du véhicule au-dessus et en dessous de la vitesse définie par le chauffeur. En permettant à la plage de vitesse de s’élargir un peu plus, il est possible d’obtenir un rendement énergétique supplémentaire», de poursuivre M. Nachtman.

Dans les camions Volvo et Mack, le frein moteur dispose d’une position automatique en dessus des réglages un à trois. Cela permet au frein moteur d’être appliqué par étapes, au fur et à mesure que le camion commence sa descente, afin de permettre une utilisation optimale de l’élan du véhicule.

«Naturellement, pour des raisons de sécurité, nous ne voulons pas que le camion roule librement en descente», d’ajouter M. Blonde. «En établissant un paramètre de statisme dans le frein moteur, nous gérons la vitesse du camion en modulant le frein moteur, en commençant à l’étape 1 jusqu’à l’étape 3 une fois que le camion a atteint la limite du statisme [jusqu’à 16 km/h au-dessus de la vitesse définie par le client].»

Toutes ces fonctionnalités sont connues sous différents noms spécifiques à différents fabricants, mais elles fonctionnent essentiellement de la même manière, sauf quelques variations. Daimler, par exemple, appelle son régulateur de vitesse avancé optionnel Intelligent Powertrain Management. Il offre, entre autres caractéristiques, une stratégie prédictive de changement de vitesse en fonction du terrain à venir ainsi que l’accélération prédictive, ce qui augmente la vitesse du véhicule avant une pente abrupte pour éviter les rétrogradations inutiles et la «déclivité» en roue libre, ce qui permet au véhicule d’augmenter sa vitesse en fin de descente dans une déclivité avant une montée.

Lors de divers essais de conduite effectués au cours des dernières années, j’ai constaté que le régulateur de vitesse ne fonctionnait pas toujours comme prévu. Lors d’un trajet en particulier, j’étais arrivé à la conclusion que le régulateur de vitesse fonctionnait mal, mais après avoir parlé à un ingénieur, j’ai appris que l’architecture électronique du régulateur de vitesse comportait quatre modes de fonctionnement distincts, essentiellement invisibles pour le chauffeur. Ils ont réagi comme ils étaient censés le faire dans différents scénarios, mais pas comme je l’avais prévu.

Avant que les flottes attribuent un camion à un chauffeur, il vaudrait la peine de faire une orientation assez approfondie avec la nouvelle technologie, pour que les chauffeurs ne soient pas confus ou même réticents à utiliser le régulateur de vitesse. Ces nouveaux systèmes offrent d’énormes gains d’efficacité, il serait dommage de les gaspiller.