Patience aux deux bouts du tunnel
Alors que Québec tergiverse sur son tunnel, Montréal s’arme de patience avec le sien.
A compter du 31 octobre, le tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine sera amputé de trois voies sur six et cela durera, si tout va bien, jusqu’en novembre 2025. Le bon vieux tunnel affiche le poids de ses 55 ans et a besoin d’une cure de rajeunissement majeure qui entraînera des maux de tête pendant trois ans.
Étant moi-même résident de la Rive-Sud de Montréal et ayant régulièrement affaire à Montréal, je me prémunis de Tylenol et j’évalue mes solutions de rechange.
«Nous sommes conscients que ces fermetures au tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine chambouleront les habitudes de déplacement de milliers d’usagers de la route. Il s’agit du meilleur scénario pour préserver à long terme ce corridor de transport indispensable», a dit le ministre des Transports du Québec (MTQ) François Bonnardel.
Il va sans dire, ces travaux occasionneront des problèmes encore plus coûteux aux entreprises de camionnage. Quelque 16 000 camions empruntent le tunnel La Fontaine chaque jour, ce qui en fait «la traversée entre la Rive-Sud et Montréal la plus utilisée pour le transport de marchandises», selon le MTQ.
Le Ministère prévoit que les temps de parcours moyens pour accéder au tunnel seront trois fois supérieurs en direction de Montréal, et quatre fois plus longs en direction de la Rive-Sud.
Le PDG de l’Association du camionnage du Québec (ACQ), Marc Cadieux, a indiqué à Transport Routier que «les coûts opérationnels vont considérablement augmenter, notamment les salaires puisque l’essentiel des chauffeurs qui font cet itinéraire sont payés à l’heure ou disposent d’un forfait de rémunération qui tient compte des temps d’attente supplémentaires. Qui voudrait se faire payer au kilomètre, pris dans des bouchons de circulation interminables?», demande-t-il.
«On n’aura pas le choix, il va falloir ajuster la tarification à la réalité du terrain», ajoute M. Cadieux. Et ces hausses seront refilées aux consommateurs. «Dans tout prix de vente d’un article qui passe à la caisse enregistreuse, le coût de transport est inclus dedans.»
Le Ministère a prévu différentes mesures d’atténuation, par exemple la séparation des mouvements de circulation sur la route 132 est, l’affichage en temps réel du temps de parcours pour atteindre le tunnel, la coordination des travaux avec les villes et autres partenaires et la bonification de services de transport collectif.
Malgré tout cela, il est facile de prédire que l’affluence automobile se déplacera vers les ponts plus à l’ouest.
La bonne nouvelle, c’est que j’ai vu hier ce qui semblait être des essais d’un train du nouveau Réseau express métropolitain (REM), lequel est prévu entrer en fonction cet automne.
La Caisse de dépôt et placement du Québec estime que le REM transportera quotidiennement 74 000 passagers dans l’axe du pont Champlain d’ici la fin de l’année. Ce n’est pas les 120 000 véhicules qui utilisent chaque jour le tunnel La Fontaine, mais le REM pourrait s’avérer la meilleure mesure d’atténuation si la population l’adopte et si le système est efficace.
Steve Bouchard
Rédacteur en chef, transportoutier.ca