Un camion 25 % moins cher, ça vous intéresse?

Un nouveau camion vous intéresserait, mais vous ne voulez pas payer le prix d’un camion neuf? Certains analystes de l’industrie croient que des manufacturiers globaux pourraient bientôt apporter en Amérique du Nord des marques beaucoup moins chères, à supposer que vous puissiez vous passer de certains équipements auxquels vous êtes habitués.

Une nouvelle étude de Frost & Sullivan, écrite par Sandeep Kar et Ryan Carmichael, prédit comment la récente récession mondiale et la hausse du prix du pétrole changeront la façon d’acheter des camions.
Kar et Carmichael étaient à Las Vegas, en janvier dernier, dans le cadre de l’événement Heavy Duty Dialogue 2011, pour dire que les nouveaux camions commerciaux bon marché – arborant probablement une marque asiatique, mais fabriqué avec des pièces de fournisseurs de partout dans le monde – deviendront réalité de notre côté de l’océan bien plus tôt que l’on pourrait le penser.
Mais pour offrir des prix de vente plus bas, il faudra vraisemblablement réduire les coûts lors de la fabrication des nouvelles plateformes de camions, par exemple en simplifiant les groupes propulseurs (moins de chevaux-vapeur), en offrant des châssis et des cabines moins élaborés ainsi que quelques gadgets électroniques en moins.
L’étude de Frost & Sullivan, intitulée Strategic Analysis of Global Low-Cost Truck Market, se base en partie sur des entrevues menées auprès des dirigeants de plus 100 des principaux fabricants d’origine et fournisseurs de partout dans le monde. 
«Les camions bon marché, qui combinent un prix d’achat attrayant et des caractéristiques adéquates, peuvent offrir une nouvelle avenue aux acheteurs existants et potentiels», affirme Sandeep Kar.
Les compagnies des pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) ont pris les devants dans la fabrication de camions à moindre prix pour les pays émergents – seuls ou dans le cadre de partenariats avec des fabricants européens connus de véhicules lourds. Mais ils n’ont vraisemblablement pas l’intention de s’arrêter là.
Ils mettent au point plusieurs plateformes de camions globales, considérées comme luxueuses dans leurs marchés, qui pourraient facilement se positionner comme des solutions à moindre coûts dans les marchés occidentaux établis.
«Ne sous-estimez pas ces camions », avertit M. Kar. «Ces entreprises nagent dans l’argent… et elles ne se contenteront pas seulement d’entrer sur le marché (nord-américain). Elles sont très déterminées et s’attendent à faire partie du marché.»
Et nous avons largement dépassé l’étape des «si», ajoute-t-il. «Certains fabricants (étrangers) à qui nous avons parlé ont indiqué qu’ils attendent seulement que le marché (nord-américain) se rétablisse et atteigne des masses critiques avant de dévoiler leurs stratégies.»
Selon lui, ce n’est pas une coïncidence si plusieurs joueurs du BRIC ont établi des installations en Amérique du Sud et au Mexique. «C’est pour tester le marché», confirme M. Kar, mais aussi pour établir une base de fabrication et avoir un pied à terre qui leur permettra de s’infiltrer en Amérique du Nord.
MM. Kar et Carmichael soulignent toutefois que ces véhicules économiques ne perceront pas de sitôt tous les secteurs du camionnage nord-américain.
Les camions autoroutiers, en raison de leurs caractéristiques particulières et de leurs exigences opérationnelles, seront épargnés au début mais, dans plusieurs déclinaisons de camions urbains et de courtes distances à cabine de ville, les «camions à moindre prix sont très favorables», car les acheteurs peuvent épargner entre 10 et 30 pour cent, précise M. Kar.
Typiquement, un «camion économique» étranger se vend entre 4 000$ et 20 000$ pour un poids léger; entre 15 000$ et 40 000$ pour un poids moyen, et entre 30 000$ et 70 000$ pour un véhicule commercial lourd.
Il est vrai que les camions étrangers bon marché seront confrontés à des défis de taille ici : distribution, soutien à la clientèle et embûches réglementaires comme les normes anti-pollution. Mais les deux analystes ne considèrent pas ces obstacles comme insurmontables. Les normes chinoises et indiennes sur les émissions polluantes seront au niveau d’Euro 5 et de l’EPA 2010 d’ici cinq ans environ alors que les normes anti-pollution globales s’harmoniseront. Et bien que le coût additionnel pour se conformer diminuera l’énorme avantage que possèdent les véhicules étrangers au niveau du prix, un camion lourd chinois ou indien sera encore 10 à 20 pour cent moins cher que les modèles actuels comparables, précise M. Kar.
Mais, bien que ces camions pourraient offrir moins de caractéristiques et, dans certains cas, un cycle de vie plus court, M. Kar est d’avis que l’écart de qualité se referme rapidement. «Ce n’est pas une question de faire des camions bon marché, mais plutôt de fabriquer des camions de façon économique».
«Depuis dix ans, d’importants progrès ont été faits en Chine et en Inde et, d’ici à ce que leurs camions arrivent sur le marché nord-américain, ils seront encore meilleurs, ce qui en rehaussera la fiabilité.»
En outre, la nationalité de plusieurs de ces camions –particulièrement les modèles qui pourraient pénétrer le marché d’ici – est sans doute discutable.
Prenez le Prima, un camion global offert par la compagnie indienne Tata Motors. Il est développé en Corée du Sud, dessiné par des italiens, propulsé par Cummins et la transmission est une ZF. Le châssis est mexicain et de nombreuses autres composantes proviennent de compagnies américaines, européennes et japonaises.
«Apparemment, la seule chose qui soit indienne sur ce camion est la plaque du logo», plaisante M. Kar, qui trouve néanmoins rassurant que les fabricants occidentaux «ne prennent pas la menace à la légère et soient proactifs».
Des compagnies comme Daimler, Volvo, MAN, Iveco et Navistar, entre autres, augmentent leurs efforts dans le secteur du camion global à moindre coût. «Ces sociétés veulent non seulement défendre leur marché locaux contre ces attaques… mais elles veulent aussi transporter la bataille outre-mer, en territoire asiatique», prévient M. Kar.
Il se dit assuré que, si le marché du bon marché s’installe ici, plusieurs de fabricants connus feront ce qu’ils doivent faire pour être dans le coup – par le biais d’associations ou individuellement – en repensant leurs plateformes et leurs stratégies de coûts.
Une fois la poussière retombée, on pourrait bien voir apparaître une industrie à deux vitesses, divisée entre les camions autoroutiers haut de gamme luxueux et technologiques, et les camions de courtes distances modestes dans leurs équipements et dans leur cylindrée, mais offrant un prix attrayant.
Il reste à voir ce qui s’offrira aux clients qui ont l’habitude d’acheter un produit qui se situe entre les deux. 
 

Steve Bouchard écrit sur le camionnage depuis près de 30 ans, ce qui en fait de loin le journaliste le plus expérimenté dans le domaine au Québec. Steve est le rédacteur en chef de l’influent magazine Transport Routier, publié par Newcom Média Québec, depuis sa création en 2000. Il est aussi le rédacteur en chef du site web transportroutier.ca et il contribue aux magazines Today’s Trucking et Truck News.

Steve rédige aussi le bulletin électronique de Transport Routier, Les nouveautés du routier, et il participe à l’élaboration des stratégies de communication pour le salon ExpoCam de Montréal, propriété de Newcom.

Steve est détenteur d’un permis de conduire de classe 1 depuis 2004 et il est le seul journaliste de camionnage au Québec à avoir gagné des prix Kenneth R. Wilson de la Presse spécialisée du Canada, l’or et l’argent deux fois chacun.

Steve a occupé la présidence et la présidence du Conseil du Club des professionnels du transport du Québec et il représente les médias au comité des fournisseurs de l’Association du camionnage du Québec. En 2011, il a reçu le prestigieux prix «Amélioration de l’image de l’industrie» remis par l’Association du camionnage du Québec.

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