Suivi technologique
Transports Canada a démontré deux choses à Blainville : que l’automatisation a fait de grands progrès, mais que l’autonomie pure est encore très loin.
«On peut contrôler bien des choses, mais pas la température», a plaisanté Yves Provencher, ingénieur forestier et directeur du Groupe PIT, en référence à la pluie qui s’est abattue toute la journée sur la piste du Centre d’essais et de recherche PMG, à Blainville.
C’est là que divers journalistes et membres de l’industrie du camionnage étaient conviés à une démonstration du système de conduite en peloton coopératif pour les véhicules lourds du programme écoTECHNOLOGIE pour véhicules de Transports Canada. «Mais si le système fonctionne dans ces conditions, ça veut dire qu’il fonctionne bien», de poursuivre M. Provencher.
Le système en question est le fruit d’une collaboration entre différents organismes du Canada et des États-Unis, dont le Conseil national de recherches Canada (CNRC), l’Université de Californie à Berkeley, Transports Canada et le Groupe PIT.
Du côté du Groupe PIT, l’idée du suivi en peloton remonte à 2008 et impliquait deux camions ordinaires se suivant de près – tout simplement – à la manière des cyclistes et des oiseaux migrateurs. L’organisme avait alors commencé à tester les effets du phénomène aérodynamique d’aspiration sur la consommation de carburant et les résultats se sont avérés concluants.
C’est donc l’économie de carburant, et par conséquent la réduction des émissions, qui se retrouvent au cœur du projet. Lors de la démonstration, le peloton était constitué de trois camions Volvo équipés notamment d’une caméra vidéo, d’un système GPS 5Hz, d’un radar de régulation de distance et de deux antennes DSRC (communications dédiées à courte portée). À partir de quatre camions, les avantages du suivi en peloton commenceraient à s’estomper.
Ensemble, ces technologies offrent une automatisation expérimentale de niveau 2 qui s’apparente aux régulateurs de vitesse adaptatifs présentement disponibles dans certains véhicules automobiles. Lorsqu’une vitesse de croisière prédéterminée est atteinte, en l’occurrence 105 km/h, les camions qui suivent le véhicule de tête se mettent en mode «automatique» et les chauffeurs peuvent retirer leur pied de l’accélérateur. À cette vitesse, les poids-lourds conservent un écart de 0,6 seconde, ce qui correspond à une distance de 17 ou 18 mètres. Différentes combinaisons d’écart/vitesse ont préalablement été testées.
Il est à noter que l’information échangée entre les véhicules est mise à jour 10 fois par seconde, et qu’un bouton de désengagement d’urgence permet aux chauffeurs de rompre le lien à tout moment.
Au départ, la technologie de conduite en peloton devait être rétro-compatible avec les camions existants mais on nous a précisé que c’était de moins en moins probable. En raison de son haut degré de complexité, elle devra plutôt être incorporée aux véhicules au moment de la fabrication.
Lors de la dernière séance de questions, la discussion a vite dépassé le cadre de la démonstration pour aborder un sujet qui, il y a quelques années, relevait essentiellement de la science-fiction : les véhicules autonomes de niveau 4 et 5, sans chauffeur, sans volant et même sans cabine!
Bien qu’on nous ait répété que cela n’arriverait pas de sitôt, que personne dans la salle n’en serait témoin de son vivant, que les avancées technologiques rapportées dans les médias excèdent ce que les fabricants sont réellement capables d’accomplir – un vent de scepticisme planait sur l’assistance.
Certes, les camions qui se conduisent tout seul ne feront pas leur apparition de sitôt. Et les chauffeurs, qui s’occupent notamment de la vérification avant départ (sur le point de devenir la ronde de sécurité), de l’arrimage, du chargement/déchargement s’il y a lieu et des formalités lorsque vient le temps de traverser la douane, sont bien trop précieux pour être remplacés par des capteurs et des radars. Et comme l’a mentionné Brian McAuliffe, agent principal de recherche et chef de groupe au CNRC, «davantage de tests sont nécessaires pour savoir exactement quelle quantité de carburant il est possible d’économiser grâce à cette technologie». Mais c’est bien connu, on n’arrête pas le progrès.
Peut-être que le public n’est pas encore favorable, peut-être que la réglementation n’est pas adaptée et que les infrastructures ne sont pas prêtes. Mais la prochaine génération de véhicules autonomes, elle, est sur le point de faire son entrée en piste.
Imaginez la suite.
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