Alexanne Giguère veut que les camionneuses enceintes aient droit au retrait préventif
Dans son premier texte publié sur Chicks and Machines, un magazine web écrit par et pour des femmes férues de sports motorisés, Alexanne Giguère se présente comme «une camionneuse totalement passionnée de son métier».
C’est que la jeune femme de Lévis partage une autre passion : piloter une moto de course. Nouvellement maman, elle se consacre aussi à une missions qui lui tient à cœur : le droit pour les camionneuses enceintes d’avoir accès au retrait préventif.
Elle s’est d’ailleurs fait découvrir comme chroniqueuse grâce à un texte qu’elle a écrit au sujet du retrait préventif des camionneuses enceintes. «Ce texte a beaucoup voyagé», dit-elle.
«Une des collaboratrices (de Chicks and Machines), camionneuse elle aussi, leur a parlé de moi. Je suis camionneuse et je fais de la moto de course, alors c’est deux sujets sur lesquels je peux écrire.»
Après des explorations collégiales en techniques policières et en soins infirmiers, c’est finalement l’appel des camions qui a gagné.
Diplômée du Centre de formation en transport de Charlesbourg en 2018, Alexanne conduit des remorques-citernes pour Transport Norcité. «C’était mon rêve, je voulais livrer du pétrole», lance-t-elle. Et pourquoi? «Tu n’attends jamais. Il n’y a jamais un autre camion qui va aller livrer à la même place et en même temps que toi.»
À la fin de ses chroniques, elle signe : la Chicks de la raffinerie.
«La vocation m’est venue assez tard», écrit-elle encore. «J’ai toujours aimé les camions, du plus lointain dont je me souvienne, mais un DEP ne comptait pas comme des études supérieures», ce que ses parents souhaitaient qu’elle poursuive.
Dans sa famille, personne ne gagne sa vie au volant d’un camion. Elle explique dans une chronique : «Tsé, le petit enfant sur le bord de la rue qui regarde le gros camion passer devant lui, les yeux brillants d’étoiles, c’était moi.»
L’écriture lui est naturelle. Elle s’en sert pour faire connaître le métier aux femmes qu’une carrière dans le camionnage pourrait intéresser. Elle parle de la formation, de la place des femmes dans l’industrie et elle donne l’heure juste quant aux réalités du métier. «Mon but, c’est d’éclairer les femmes avant qu’elles se lancent, pour qu’elles soient sûres et certaines qu’elles sachent exactement ce qu’est le métier.»
«De plus en plus de femmes s’intéressent au camionnage. C’est le meilleur moment pour leur faire connaître le métier», constate-t-elle.
Tout cela ouvre la voie à la cause à laquelle elle se consacre : l’accès au retrait préventif pour les camionneuses enceintes.
Il faut savoir que les conductrices de camions n’ont pas droit au programme Pour une maternité sans danger de la CNESST. Le programme s’adresse aux travailleuses enceintes ou qui allaitent et dont l’emploi comporte des dangers physiques pour elles ou pour l’enfant.
«Au début de ma grossesse, j’ai voulu avoir accès au retrait préventif, mais on m’a dit que je n’y avais pas droit», déplore Alexanne. La raison étant que les travailleuses au service d’une entreprise de compétence fédérale ne sont pas admissibles.
«La loi est mal faite. N’importe quel métier au Québec a droit au programme. Toutes les entreprises sous réglementation provinciale doivent payer la prime. Mais les entreprises sous réglementation fédérale ont le choix de couvrir la grossesse ou pas. C’est une prime qui coûte excessivement cher. Les entreprises ne la paieront pas pour une seule camionneuse enceinte», explique-t-elle.
«Nous sommes plus de 1 600 camionneuses au Québec, et nous sommes plus de 1 600 femmes non couvertes.»
«Le retrait préventif dans le camionnage devrait être immédiat, car c’est dangereux pour le fœtus immédiatement, notamment en raison des vibrations. Tu dois arrêter dès que tu es enceinte, mais tu arrêtes à tes frais, car personne ne te couvre», poursuit Alexanne.
Sa mission, c’est de faire modifier la réglementation pour que les camionneuses soient admissibles au programme Pour une maternité sans danger. Et elle s’y consacre aussi avec passion.
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