Jessica Sandström, de Volvo Trucks, nous parle de durabilité globale au salon de l’IAA

Volvo Trucks a présenté six camions électriques européens au salon IAA Transportation à Hanovre, en Allemagne, ainsi qu’un nouvel essieu électrique qui sera éventuellement disponible en Amérique du Nord. Nous avons rencontré Jessica Sandström, vice-présidente principale – gestion des produits et durabilité, pour parler de la vision de Volvo en matière de mobilité durable et de transport vert.

Transport Routier – Volvo Trucks travaille constamment sur différents projets d’électrification, qu’il s’agisse d’électrification par batterie ou par pile à combustible à hydrogène. Quels sont les projets sur lesquels vous travaillez actuellement dans ce domaine ?

Jessica Sandström – Notre objectif est de réaliser notre stratégie à long terme, qui consiste à ne produire aucune émission. Et pour y parvenir, nous travaillons sur trois axes en parallèle. Cela signifie que nous continuons à faire évoluer nos camions électriques à batterie, nous travaillons à la première introduction de notre camion électrique à pile à combustible, et nous continuons à travailler pour rendre le moteur à combustion plus efficace afin d’avoir la capacité de fonctionner avec différents carburants. Il pourrait s’agir de bioénergie, d’huile végétale hydrotraitée, mais aussi d’hydrogène provenant directement d’un moteur à combustion. Nous travaillons donc sur tout cela en parallèle, car c’est le défi et la beauté de la transformation dans laquelle nous nous trouvons.

TR – En Amérique du Nord, nous connaissons le projet LIGHTS que Volvo a mené en Californie. Volvo se concentre-t-il davantage sur les véhicules électriques à batterie à l’heure actuelle ?

JS – Nous avons six modèles de camions électriques à batterie en production de série. Nous pensons être la marque qui propose l’offre la plus large sur le marché. Nous avons commencé tôt, avec la première production en série du FL électrique en 2019, puis nous avons ajouté le VNR électrique en 2020. L’évolution se poursuivra. C’est la première génération de poids lourds électriques à batterie, et nous travaillons déjà sur la prochaine génération avec l’essieu électrique que nous avons présenté à l’IAA afin de pouvoir augmenter encore l’autonomie.

Nous travaillons avec les batteries depuis de nombreuses années. Nous avons commencé en 2009 avec nos premiers autobus hybrides – c’était en fait le point de départ pour nous. C’était la première fois que nous intégrions des batteries dans nos véhicules. Cela a jeté les bases de l’acquisition de connaissances au sein du groupe.

Jessica Sandström (Photo: Volvo Trucks)

Quant à la pile à combustible, elle fait également l’objet de recherches depuis très longtemps. Mais maintenant, comme vous le savez avec cellcentric, nous voulons nous assurer, avec Daimler, que nous prenons l’initiative d’industrialiser la solution. Elle sera industrialisée en production de série dans la seconde moitié de la décennie, c’est le message que nous communiquons, mais nous avons aussi révélé hier les clients sélectionnés avec lesquels nous commencerons à faire les tests en 2025.

Mais, bien sûr, nous sommes beaucoup plus avancés en ce qui concerne les camions électriques à batterie, ils sont déjà en production.

Si l’on se place dans une perspective globale, nous pensons que la majorité des camions seront électriques à batterie et que la pile à combustible viendra en complément. Ces derniers seront utilisés pour le transport lourd et les longues distances. Il pourrait aussi y avoir des utilisation où vous n’avez pas le temps de faire la recharge, ou vous n’avez pas accès à la recharge électrique, alors l’hydrogène et la pile à combustible pourraient être une très bonne option.

TR – Comment voyez-vous le développement de la batterie ?

JS – Si l’on regarde ce que nous avons vécu au cours des dix dernières années, si l’on prend un peu de recul et que l’on observe vraiment l’évolution des batteries que nous avons vue sur cette période, je pense que nous sommes déjà dans une révolution. Aujourd’hui, nous pouvons parcourir 300 km en une seule charge avec un poids lourd de 44 tonnes; aux États-Unis, nous pouvons même parcourir 440 km. Il y a dix ans, nous n’aurions pas pu imaginer que cela soit possible. Et il y a encore de nombreuses étapes à franchir.

TR – Certaines personnes disent que la batterie est une technologie de transition et que nous pourrions même passer directement du diesel à l’hydrogène. Que répondez-vous à ces personnes ?

JS – Nous ne pensons pas comme cela. Nous pensons que la solution de la batterie est la meilleure pour de nombreuses applications, même si les camions à hydrogène sont là.

TR – Même si l’empreinte carbone de la batterie est contestée ? Certaines personnes affirment que, du puits à la roue, la batterie n’est pas une si bonne solution.

JS – Il est important de ne pas comparer avec les automobiles. Les camions font beaucoup de kilomètres et cela nous aide à récupérer le CO2 qui est produit lors de la production de la batterie. Pour chaque kilomètre parcouru avec un camion électrique, vous n’avez aucune émission de CO2. Si vous roulez à l’électricité verte, l’impact du camion à batterie sur le climat est inférieur à celui d’un camion diesel après seulement un an. Il y a quelques semaines, nous avons également annoncé que nous aurons une usine de batteries en Suède, et que nous construirons la cellule de la batterie avec de l’électricité verte.

TR – Y a-t-il des incitatifs gouvernementaux à l’achat de camion électrique en Europe ?

JS – Oui, surtout en Allemagne où l’on obtient 80 % de la différence entre un camion électrique et un camion diesel, et les incitatifs s’appliquent également aux infrastructures de recharge. Nous avons également de très bons incitatifs en Suède et en Norvège, mais dans d’autres parties de l’Europe, il n’y a rien.

Le tableau n’est pas le même partout en Europe. De même, lorsque vous commencez à examiner l’analyse de rentabilité pour le client, elle est également très différente selon les pays. Car cela dépend beaucoup du prix du diesel et du prix de l’électricité. Ensuite, vous avez différents régimes fiscaux.

TR – Vous avez dit que vous alliez introduire votre essieu électrique en Amérique du Nord. Avez-vous une date ?

JS – Dans quelques années. Mais vous parliez du décalage entre le moment où nous introduisons des choses en Europe et celui où nous les dévoilons en Amérique du Nord. Cela commence à changer. Nous voyons beaucoup plus les marchés évoluer à la même vitesse donc, maintenant nous devons être prêts à franchir le pas plus ou moins simultanément des deux côtés de l’Atlantique. Cela peut aussi être l’inverse : une technologie peut être introduite en Amérique du Nord en premier.

TR – Quel est pour vous le plus grand défi actuel en matière de mobilité durable ?

JS – Est-ce que nous, en tant que société, allons être capables de faire la transformation à la vitesse nécessaire. Notre objectif est que 50 % de tout ce que nous vendons en 2030 soit sans émission, et cela concerne les camions électriques à batterie et à pile à combustible. Nous devrions alors être en mesure d’assurer une grande partie du transport lourd dans le monde. Mais nous constatons également que dans certaines parties du monde, nous devons aller bien au-delà des 50 % pour pouvoir atteindre la moyenne de 50 %.

Par exemple, en Europe, nous pensons que nous devons dépasser les 70 % pour que tout ce que nous vendons en 2030 soit une sorte de camion électrique. Et pour y parvenir, nous devons disposer d’électricité verte là où se trouvent les camions. Le réseau doit donc être préparé. Nous devons disposer d’hydrogène vert. Ce n’est pas seulement être de l’hydrogène, mais ce doit être de l’hydrogène vert si nous voulons vraiment faire une différence pour la planète.

Bien sûr, nous ne pouvons pas tout faire par nous-mêmes. Nous avons besoin de décisions politiques et je pense que les élus doivent prendre des décisions audacieuses. Tous les acteurs du marché doivent prendre des mesures pour commencer à investir, pour montrer qu’il est possible d’opérer la transformation.

Avec Daimler et Traton, nous allons construire 1 700 chargeurs publics très performants en Europe. Je pense qu’il s’agit là d’un bon exemple de notre contribution, mais il en faut bien plus si nous voulons atteindre l’échelle dont la planète a besoin. Et je pense que c’est la même chose pour les États-Unis et le Canada, nous devons trouver un point de vue commun sur l’orientation de l’industrie, afin que tous les acteurs se sentent en confiance de faire les investissements.

Si nous voulons lutter contre le changement climatique, [nous avons besoin] de ce type de mesures non conventionnelles. Nous devons faire des choses que nous n’avons jamais faites auparavant, afin de nous adapter à la vitesse de la transformation et d’être en mesure de faire tous les investissements nécessaires pour notre société, mais nous croyons aussi que c’est la bonne chose à faire pour notre entreprise.

Steve Bouchard écrit sur le camionnage depuis près de 30 ans, ce qui en fait de loin le journaliste le plus expérimenté dans le domaine au Québec. Steve est le rédacteur en chef de l’influent magazine Transport Routier, publié par Newcom Média Québec, depuis sa création en 2000. Il est aussi le rédacteur en chef du site web transportroutier.ca et il contribue aux magazines Today’s Trucking et Truck News.

Steve rédige aussi le bulletin électronique de Transport Routier, Les nouveautés du routier, et il participe à l’élaboration des stratégies de communication pour le salon ExpoCam de Montréal, propriété de Newcom.

Steve est détenteur d’un permis de conduire de classe 1 depuis 2004 et il est le seul journaliste de camionnage au Québec à avoir gagné des prix Kenneth R. Wilson de la Presse spécialisée du Canada, l’or et l’argent deux fois chacun.

Steve a occupé la présidence et la présidence du Conseil du Club des professionnels du transport du Québec et il représente les médias au comité des fournisseurs de l’Association du camionnage du Québec. En 2011, il a reçu le prestigieux prix «Amélioration de l’image de l’industrie» remis par l’Association du camionnage du Québec.

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