Le manque de soutien réglementaire et la surcapacité pèsent sur l’industrie du camionnage

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Les frustrations liées au modèle Chauffeur inc. sont de plus en plus vives, alors que les difficultés du marché du fret ont accentué l’impact de cette concurrence déloyale sur les flottes traditionnelles.

«Les transporteurs sont furieux», a déclaré Mark Seymour, PDG de Kriska Transportation Group, lors de la conférence «Bridging Border Barriers» organisée cette semaine par la Truckload Carriers Association. «Le gouvernement ne veut tout simplement rien faire.»

Lorsqu’on lui demande si son entreprise a perdu des contrats au profit de concurrents utilisant le modèle Chauffeur inc., il répond «Oui, constamment. L’année dernière, il y avait plus de travail que quiconque ne pouvait en faire, nous étions dans un environnement de fixation des prix et ce n’était pas aussi pénible pour notre entreprise. Mais aujourd’hui, c’est un gros problème et oui, nous perdons beaucoup d’affaires.»

(Photo : iStock)

Stephen Laskoswski, président de l’Ontario Trucking Association (OTA) et de l’Alliance canadienne du camionnage (ACC), soutient que les flottes Chauffeur inc. économisent jusqu’à 30 % sur les coûts de main-d’œuvre en contournant certains impôts sur les salaires parce qu’elles classent illégalement les chauffeurs de l’entreprise comme des entrepreneurs indépendants.

«Notre message au gouvernement et à l’industrie est simple», a-t-il affirmé. «C’est clairement illégal, il n’y a pas de zone grise. C’est noir et blanc, mais, malheureusement, nous avons un gouvernement qui a décidé de ne pas faire respecter la loi.»

Repositionner les remorques vides

L’absence de progrès pour que les régulateurs autorisent le déplacement des remorques vides d’un point à l’autre aux États-Unis constitue une autre frustration pour M. Seymour, ainsi que pour M. Laskowski et son homologue américain Bob Costello, économiste en chef de l’American Trucking Associations (ATA).

«Si nous avons la possibilité de déposer une remorque chargée, d’en prendre une vide et d’aller ailleurs, c’est plus logique que de laisser un chauffeur dans son camion dont le moteur marche au ralenti pendant cinq à huit heures le temps qu’on décharge sa cargaison», a indiqué M. Seymour. «Cela n’a aucun sens.»

Il a ajouté que de nombreux transporteurs repositionnent chaque jour des remorques vides aux États-Unis sans en subir les conséquences, ce qui leur donne un avantage sur ceux qui respectent les règles dans les moindres détails. L’ACC, la TCA et l’ATA sont tous trois favorables à la modernisation des réglementations afin de permettre le repositionnement des remorques vides de part et d’autre de la frontière.

M. Costello a affirmé : «Nous travaillons activement et constamment, je vous le promets, sur cette question parce qu’elle est tout simplement logique.»

Mais il a ajouté que la résistance vient de certains secteurs du gouvernement qui estiment que si la règle est modifiée pour le transport routier, elle devra également s’appliquer à d’autres modes de transport. Et si elle s’applique au Canada, elle devra être étendue au Mexique également.

«Et lorsque cela se produit, les syndicats commencent à s’énerver», a-t-il expliqué. «J’ai proposé de lancer un projet pilote uniquement avec le Canada. Ils ont alors trouvé une autre excuse.»

Une capacité trop importante

Plus tôt dans la journée, M. Costello avait dressé un dur tableau économique pour les transporteurs présents dans la salle, soulignant qu’il faudrait que davantage de capacité quitte le marché avant que l’offre et la demande ne se rééquilibrent. Bien que Kriska ne soit pas très exposée au marché au comptant, là où les baisses de volume de fret et de taux les plus importantes ont été observées. M. Seymour a souligné qu’il ne voyait pas de redressement rapide pour l’ensemble de l’industrie. Mais si le rythme des faillites s’est accéléré aux États-Unis, il ne constate pas la même chose au Canada.

«Je dois penser que ce n’est pas très loin», a-t-il ajouté à propos d’une réduction de la capacité au Canada. «Nous sommes par nature résistants, mais je ne sais pas comment les gens peuvent supporter des coûts inflationnistes encore plus élevés associés à une pression sur les prix.»

Selon M. Laskowski, ces pressions sont exacerbées par les initiatives gouvernementales qui augmentent encore les coûts pour les transporteurs. Par exemple la taxe carbone. «Le message que les transporteurs adressent au gouvernement est le suivant : vous devez en être conscient et être prudent dans ce que vous faites et dans les coûts que vous imposez à la communauté des transporteurs», a-t-il déclaré.

M. Costello a réitéré son message selon lequel la reprise du fret ne sera pas tirée par la demande, mais nécessitera au contraire une nouvelle réduction de l’offre de services de camionnage. Les victimes les plus probables seront les petites flottes qui dépendent fortement du marché au comptant, en particulier celles qui sont entrées dans le secteur lors de la récente période de prospérité et qui ont surpayé le matériel roulant d’occasion.

Ce matériel d’occasion ne vaut d’ailleurs pas grand-chose par rapport à ce qu’il valait il y a quelques années.

«Il ne vaut rien», dit M. Seymour. «Mais vous le vendrez, à moins qu’il ne s’agisse d’une épave totale. Mais la chute des valeurs de l’année dernière, à laquelle nous nous sommes habitués, est très différente aujourd’hui. C’est un vent contraire de plus auquel nous sommes confrontés lorsque nous nous débarrassons de notre matériel d’occasion.»

Des délais d’émission irréalistes

Les panélistes ont également exprimé une certaine frustration à l’égard des réglementations gouvernementales visant à décarboner le transport routier, en particulier les échéanciers agressifs et irréalistes imposés par des organisations telles que le California Air Resources Board (CARB).

«En tant qu’industrie, nous nous sommes engagés à réduire notre empreinte carbone», a fait part M. Laskowski. «Le problème, ce sont les délais irréalistes. Nous ne pouvons pas les respecter, non pas parce que nous ne voulons pas le faire ou que nous ne voulons pas dépenser l’argent, mais parce que la technologie, l’infrastructure ou la maintenance n’est pas encore là. Il y a toute une série de problèmes et de défis à relever.»

Le réseau électrique n’est pas encore prêt à supporter les camions électriques, a ajouté M. Laskowski, en relatant l’histoire d’un membre d’une petite communauté qui a acheté un seul camion électrique à batterie de classe 8 et qui a provoqué des pannes de courant dans la communauté lorsqu’il l’a rechargé.

La frustration est partagée au sud de la frontière. M. Costello a émis qu’il préférerait que les régulateurs fixent l’objectif, puis qu’ils laissent l’industrie atteindre cet objectif comme elle l’entend.

«Fixer l’objectif et dire « Eh! l’industrie, débrouillez-vous! ». Ils nous disent qu’il faut que ce soit des véhicules électriques à batterie C’est un problème. S’ils se soucient d’éliminer le carbone de l’air, nous pourrions atteindre une réduction de 60 % très rapidement», a-t-il affirmé, faisant référence aux technologies pratiques et facilement accessibles qui existent aujourd’hui. «Il ne s’agit pas seulement de délais irréalistes, mais aussi de la flexibilité nécessaire pour y parvenir. Tant que nous atteignons ces objectifs, nous pouvons le faire de la manière qui nous convient le mieux.»

Lorsqu’on lui a demandé de faire une prédiction pour l’année à venir, M. Seymour a suggéré aux transporteurs de s’attendre à quelques autre trimestres difficiles.

«Ce qui est susceptible de changer la situation, c’est une contraction de l’offre. Les transporteurs sont résistants, déterminés et trouvent des moyens de s’en sortir. Je pense que la contraction de la capacité se fera lentement et, si c’est ce qu’il faut pour que nous nous sentions tous mieux, nous devrions probablement attacher nos ceintures en prévision de quelques trimestres difficiles en 2024. La situation que nous ressentons actuellement n’est probablement pas près de s’améliorer.»

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