Le visionnaire: Sandeep Kar

Sandeep Kar, de Fleet Complete, entrevoit un futur fait de repérage, de télématique et d’automatisation

L’avenir du camionnage sera intelligent, et les chauffeurs y participeront bien plus qu’à titre de passagers. C’est ce que croit Sandeep Kar, directeur de la stratégie chez Fleet Complete et analyste de longue date de l’industrie du camionnage.

Il observe à quel point les avancées technologiques et télématiques des camions sont en train de bouleverser le modèle d’affaires du transport de marchandise. Des
transformations fondamentales sont déjà en train de se produire, dit-il, et ce n’est qu’une question de temps avant que l’ensemble de l’industrie les adopte.

À titre de fournisseur de services télématiques, la technologie est constamment sur ses écrans radars mais il estime qu’encore bien des aspects de l’écosystème des
camions intelligents demeurent à découvrir. « L’industrie se dirige vers un type de camion des plus intéressants », dit-il. Ce camion sera vert, sécuritaire et connecté.

« Lorsqu’on en assemble toutes les facettes, on réalise que ce camion sera un camion intelligent. Et ce camion sera vraiment intelligent lorsqu’il ne sera plus seulement utilisé dans l’objectif de faire baisser les coûts mais aussi de générer des opportunités d’affaires lucratives pour les entreprises. » Cela passe en partie par la conduite autonome. M. Kar tient à souligner que le futur qu’il entrevoit ne sera pas sans chauffeurs. Il s’agit plutôt d’un avenir dans lequel le chauffeur
a un nouveau rôle, qu’il exerce toujours en cabine. Lorsqu’il ne sera pas au volant pour s’acquitter des tâches de conduite de la dernière portion d’un trajet, ce chauffeur des temps modernes travaillera à dénicher plus de marchandise à transporter ou à s’acquitter de responsabilités autrefois prises en charge par le siège social, par exemple la répartition ou la confection des horaires.

« Un chauffeur de camion participe à l’achat du camion, à l’entretien du camion, l’inspecte, fait les livraisons, signe les documents qui s’y rattachent et fait le plein de carburant. Alors il n’est pas question d’éliminer le chauffeur du processus », déclare M. Kar. « En fait, grâce à toute cette technologie, les chauffeurs pourront générer plus de revenus tout en subissant moins de stress. C’est possible avec la télématique. »

Au-delà des camions autonomes, il estime que la technologie permettant à un camion de communiquer pour identifier des cargaisons prêtes pour la cueillette à proximité
est déjà à notre portée. La combinaison de la télématique au modèle d’économie de partage ne contribuera pas seulement à réduire les kilomètres parcourus à vide, il réduira aussi les coûts et facilitera la tâche des expéditeurs. De leur côté, les transporteurs subiront moins de congestion routière et de pollution, en plus de voir leur cycle de paiement s’accélérer. « C’est gagnant-gagnant pour tout le monde », dit M. Kar.

Nous ne sommes toutefois pas encore au point où de telles pratiques sont monnaie courante. Selon M, Kar, le taux de pénétration encore relativement limité de la télématique – 25% à 30% des camions lourds – demeure un obstacle au développement de ce nouvel écosystème. Pourtant, la valeur que représente la télématique en matière d’économie de carburant, de sécurité, de conformité réglementaire et de réduction des défaillances techniques est bien connue, dit-il. Les flottes savent à quel point la technologie contribue à réduire leurs frais d’exploitation. Cette transformation est déjà en marche. Alors que de plus en plus camions sont dotés de solutions télématiques dès leur sortie des usines des fabricants d’équipement d’origine, il prévoit que ce taux de pénétration grimpera à près de 80% d’ici 2025.

Ce meilleur des mondes que M. Kar devine se profiler à l’horizon s’incarnera dans une approche globale, où le camion lui-même représentera une solution aux défis qu’une flotte doit relever chaque jour : « Comment est-ce que je fais pour que le camion soit utilisé de façon optimale? Comment je lui assure de la puissance sur demande? Comment je peux réduire les probabilités que ce camion soit impliqué dans un incident ou un accident? Comment je peux générer plus d’opportunités de transport pour ce camion? Comment je m’assure que chauffeur de ce camion soit bien reposé, nourri et demeure en santé tout en éprouvant du bien-être pendant qu’il en est aux commandes? Comment je fais en sorte que ce camion soit propre et bénéfique pour l’environnement? »

C’est là que les technologies les plus récentes et les plus avancées vont se combiner pour multiplier les avantages découlant de la communication et de la connectivité, dit-il. Qu’il s’agisse d’entretien préventif, de conduite autonome ou de livres de bord électroniques, toutes ces caractéristiques déjà existantes seront mises en commun par les fabricants de camions, les fournisseurs de services télématiques, les concessionnaires, les décideurs du monde politique et de
celui de la finance afin de créer toujours plus d’opportunités et d’économies d’échelle.

« Mon rôle, c’est de rassembler tous ces acteurs apparemment dissemblables autour d’un objectif commun. Le résultat de ces synergies et de ces partenariats sera la
création de véhicules et de technologies qui permettront d’améliorer l’industrie de façon spectaculaire, de réduire les défaillances techniques ainsi que les probabilités que se produisent des incidents pouvant avoir un impact sur la vie humaine ou la propriété. Ce faisant, on générera plus d’opportunités pour ceux et celles qui continuent de voir le véhicule commercial comme faisant partie intégrante de l’industrie au sein de laquelle ils évoluent. »

Au final, le camion ne peut être retiré de l’équation selon M. Kar. Il se rappelle le moment où sa fille lui a demandé pourquoi il aimait autant les camions. « Je lui ai dit : “Quand tu penses à un camion, tu ne le fais pas avec ton coeur mais avec ta tête parce que, en bout ligne, un camion ça sert à transporter des choses. Si toutes les voitures devaient disparaître aujourd’hui, le monde en ressentirait l’impact bien sûr. Mais cet impact serait de nature plutôt abstraite. Mais si on fait disparaître les camions, c’est le monde entier qui s’arrête” », évoque-t-il. « Les camions sont à ce point cruciaux pour nos économies, pour nos sociétés, pour notre existence. »

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