Les centres de formation réinventent leurs méthodes de recrutement

Se « réinventer ». L’expression a été répétée à satiété au cours de la dernière année et c’est, dans les faits, très exactement ce qu’ont fait de nombreuses entreprises et organisations liées de près ou de loin à l’industrie du camionnage.

Les centres de formation en transport – CFTR de St-Jérôme et CFTC de Charlesbourg – intégrés au système public québécois d’éducation ne font pas exception. En effet, les deux établissements lancent ces jours-ci une campagne de séduction afin de recruter de nouveaux chauffeurs de camions, à la fois sur les réseaux sociaux et à la télé.

Le programme peut être complété en à peine cinq mois, dit-on dans le message vidéo.
(Photo : CFTR)

En entrevue à Transport Routier, le directeur adjoint du CFTR, Sébastien Roy, explique qu’en raison de la pandémie de COVID-19, il était devenu pratiquement impossible de tenir des séances d’information destinées aux recrues.

« La pandémie fait en sorte qu’on ne peut plus avoir 125 personnes dans une salle pour expliquer le contenu du programme », dit-il. « On faisait une séance d’information pour expliquer ce qu’est le DEP Transport par camion, quelles sont les conditions d’admission, les critères de la SAAQ pour le permis de conduire et les différents types de transport, ce qu’est cette industrie. C’est comme ça qu’on meublait notre pipeline d’inscriptions. »

L’un des points pivots de ces réunions était de renseigner les jeunes sur le fait que, depuis 2016, ils peuvent accéder plus rapidement au métier de camionneur, grâce au Programme enrichi d’accès à la conduite de véhicules lourds (PEACVL).

« Tu n’es plus obligé d’attendre à 19-20 ans pour conduire un camion »

 

« Tu n’es plus obligé d’attendre à 19-20 ans pour conduire un camion », résume M. Roy, précisant que grâce au PEACVL : « Tous les détenteurs de permis probatoires de classe 5 peuvent accéder à un permis des classes 1, 2 et 3. » Un lien vers la page Web dédiée à ce programme a d’ailleurs été envoyé à 9 000 conseillers en orientation de diverses écoles secondaires du Québec.

Les budgets autrefois alloués à la location de salles un peu partout au Québec ont ainsi été réaffectés à la préparation d’une capsule vidéo de 30 secondes, que l’on peut déjà consulter – et partager – sur YouTube et autres plateformes.

Elle sera également diffusée, en avril et en juin, sur des chaînes du groupe TVA consacrées à l’information en continu, aux événements sportifs ou encore ayant une forte proportion de femmes dans leur auditoire.

Le « timing » n’est pas anodin puisque le mois de juin correspond à la fin des classes, un moment où bien des jeunes se questionnent sur leur cheminement de carrière.

Cibler les jeunes et les femmes

Les jeunes femmes font partie du public cible. (Capture d’écran de la vidéo promotionnelle)

Ce sont d’ailleurs les jeunes et les femmes – deux groupes démographiques sous-représentés dans notre industrie – qui sont le public cible de cette offensive médias, sans oublier les adultes en transition de carrière parce que la pandémie a bousculé leur ancien secteur d’activité.

Ces clientèles « externes » ont d’ailleurs déjà commencé à cogner à la porte de l’industrie du camionnage, selon M. Roy. « On a des visages qu’on n’avait pas avant. On a des gens qui viennent d’autres professions, qu’on n’a jamais vus ici », dit-il.

La publicité elle-même est bien conçue et appuie sur les bons boutons pour aller chercher une clientèle de milléniaux, dont les valeurs diffèrent de celles des générations les ayant précédés.

Il y est par exemple question de l’importance de faire un travail qu’on aime, de la possibilité de faire du transport local ou régional si on le désire afin d’être à la maison plus souvent et de mieux concilier travail et vie personnelle. On rappelle même que certains employeurs permettent à leurs chauffeurs de voyager avec leur animal de compagnie, avec un « wouf » bien sonore d’un chien en animation.

C’est déjà beaucoup lorsqu’on n’a que 30 secondes pour véhiculer un message, mais ce n’est pas la contrainte de temps qui explique que, jamais dans la publicité, on ne fait référence aux salaires ou à des termes comme « emplois payants ».

C’est un choix délibéré. « On a plus envie d’attirer des gens qui ont envie de relever ce défi-là, pas seulement pour l’argent et que ce désir soit éphémère et qu’ils fassent seulement six mois dans l’industrie », explique M. Roy.

Les CFT misent ainsi sur le fait que les personnes qui accrocheront à la vidéo seront motivées par les bonnes raisons. D’autre part, le directeur adjoint du CFTR rappelle que dans certaines régions, le camionnage est en compétition avec d’autres industries – le secteur minier par exemple – où les rémunérations sont très alléchantes et où l’argument monétaire aurait eu peu de poids.

Un exemple de cette disparité régionale est le fait que, pendant que le CFTR est présentement « à guichets fermés » pour la formation de la prochaine cohorte, il y a toujours des places libres dans certaines régions, comme à La Sarre en Abitibi.

Heureusement, les tracas du début de la pandémie où il était difficile de placer des stagiaires parce que des employeurs redoutaient la contamination s’ils plaçaient deux personnes dans la même cabine semblent passés.

« On n’a pas de finissants qui ne peuvent pas trouver un stage ou qui ne travaillent pas. Tout le monde se place », se réjouit M. Roy. Il souhaite d’ailleurs que la campagne publicitaire devienne virale puisqu’il  faut sans cesse renouveler la banque de candidats, les transporteurs ayant toujours besoin de plus de chauffeurs.

Vous pouvez visualiser la vidéo en cliquant ici.

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