Les Teamsters ne croient pas à la pénurie de main-d’oeuvre
NDLR: Cette opinion nous a été transmise par Stéphane Lacroix, directeur , Communications & Affaires publiques pour Teamsters Canada. Elle est signée par Jean Chartrand, président de la Section locale 106 des Teamsters. Son syndicat représente les intérêts de travailleurs et de travailleuses qui oeuvrent dans les résidences pour aînés et le camionnage.
Il ne se passe pas une seule journée sans qu’on entende parler dans les médias de pénuries de main-d’oeuvre. À en croire certains commentateurs, le manque de travailleurs et de travailleuses dans le camionnage, dans le commerce de détail, dans les résidences pour personnes âgées, dans l’agriculture, notamment, menace les fondements de notre société.
Ces commentateurs omettent de dire que ce manque de travailleurs et de travailleuses prend essentiellement sa source dans les conditions de travail navrantes qu’on retrouve dans plusieurs industries.
À ce sujet, prenons deux exemples.
Dans le camionnage il n’est pas rare que nos routiers doivent travailler 60-70 heures par semaine pour un salaire avoisinant $50 000 par année. Outre le stress causé par les heures de conduite sur des routes bouchonnées ou en perpétuelle réparation, les délais de livraison déraisonnables exigés par les donneurs d’ouvrage et les conditions climatiques, les routiers rentrent souvent tard à la maison. Par conséquent, ils dorment peu et doivent trop souvent s’accommoder d’horaires imprévisibles. En réaction à ces conditions déplorables, les jeunes travailleurs hésitent à faire carrière dans le camionnage et les plus vieux en sortent avant même d’être en âge de prendre leur retraite.
Du côté des résidences pour aînés, on remarque depuis plusieurs années qu’à part un noyau dur de travailleuses (parce que ce sont essentiellement des femmes qui occupent ces emplois), le phénomène des «porte-tournantes» devient de plus en plus apparent dans plusieurs établissements. Les raisons sont nombreuses : on y travaille pas toujours à temps plein, les salaires sont inférieurs de 4$ à 6$/h que [sic] ce qui est payé dans le secteur public et les besoins des aînés de plus en plus nombreux. Pas étonnant que les préposé(e)s aux bénéficiaires et les autres salarié(e)s de l’industrie rentrent à la maison épuisé(e)s, le soir venu, ou se cherchent des emplois ailleurs.
Pourtant, en embauchant un peu plus de main d’oeuvre pour répartir le travail équitablement, en payant des salaires raisonnables et en offrant des conditions générales décentes, les patrons de ces entreprises n’auraient plus à faire face à cette soit-disant pénurie de main-d’oeuvre.
De plus, la valeur qu’on accorde à certains métiers contribue au problème. Si nos camionneurs assurent la livraison de tous les biens qu’on retrouve à la maison et que les salarié(e)s dans les résidences pour aînés prennent soin avec dévouement de nos parents et de nos grands-parents, pourquoi sont-ils trop souvent traités comme des travailleurs de seconde zone?
Bref, y a-t-il réellement une pénurie de main-d’oeuvre dans certaines industries ou un manque de volonté de traiter équitables les travailleurs et les travailleuses? Il faudra bien, un jour ou l’autre, répondre à cette question avec franchise.
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