Mieux intégrer les modes de transport de marchandise? Oui, mais…

Il y a quelques jours a eu lieu à Québec le troisième Forum annuel de la Politique de mobilité durable (PMD).

Cet événement est « l’occasion de se concerter pour déterminer les actions à entreprendre incessamment pour réduire l’empreinte carbone des transports », dit le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD).

Plus de 140 intervenants de différentes sphères du monde du transport s’y sont réunis, une douzaine ayant participé à l’atelier qui avait pour thème « Vers une approche intégrée du transport des marchandises ».

Machinerie lourde place un conteneur sur un camion.
(Photo : iStock)

Dans la même enceinte, des représentants des modes maritime, ferroviaire et routier ont discuté des manières de décarboner le transport de marchandise en intégrant au maximum les différents types de transport.

Parmi les enjeux figuraient les obstacles à cette optimisation à faible empreinte carbone ainsi que les solutions permettant de les surmonter.

L’empreinte carbone du camionnage

Marc Cadieux, président-directeur général de l’Association du camionnage du Québec (ACQ) était présente au forum et à cet atelier en particulier.

En entrevue à Transport Routier, il explique que son rôle était notamment de rappeler les efforts déployés par l’industrie du camionnage pour réduire son empreinte carbone.

« L’industrie du transport routier aimerait qu’on reconnaisse les efforts qui ont été faits et les efforts qui sont en continuelle évolution, tout en admettant qu’il reste des choses à faire », dit-il.

Il cite en exemple l’adoption des nouveaux moteurs diesel à réduction catalytique sélective qui, grâce à l’injection d’urée, permettent de réduire de façon significative les émissions d’oxyde d’azote (NOx) et la marche déjà bien entamée vers l’électrification des poids lourds.

M. Cadieux fait valoir que tous les fabricants de camions ont présentement une offre de véhicules électriques. « Ils sont plus que sur la table à dessin, ils sont dans la livraison de camions de nouvelle génération », dit-il.

Mais les prix de ces camions zéro émission ont de quoi faire réfléchir plusieurs flottes. « Le programme Écocamionnage est en remise à jour en ce moment. On a sensibilisé le gouvernement sur l’augmentation des coûts d’acquisition des équipements. Un camion électrique, ce n’est plus seulement 200 000 $, c’est des 400 000 $ ou 500 000 $ l’unité », dit le PDG de l’ACQ.

Les clients absents

Selon M. Cadieux, les grands absents de ce forum étaient les clients expéditeurs, qui choisissent un mode plutôt qu’un autre.

« Ceux qui nous manquent ici aujourd’hui, c’est nos clients. Ceux qui nous amènent des exigences. Ceux qui nous ont choisis et les exigences qu’ils nous mettent sur la table », dit-il.

« Ils ont des choses à comprendre, ils ont des messages à se faire donner venant des objectifs que les gouvernements veulent atteindre », ajoute-t-il.

Le MTMD en a apparemment pris bonne note puisque « l’importance de mettre l’expéditeur de la marchandise au cœur de la démarche » fait partie des éléments qui ont retenu son attention au terme de l’exercice.

Communiquer pour mieux s’intégrer

Les porte-paroles des différents modes de transport se connaissent bien et travaillent déjà à intégrer leurs opérations respectives.

On le voit lorsqu’il y a un blocus ferroviaire, une grève portuaire ou des manifestations qui bloquent les frontières aux camions : ils n’ont pas le choix de se parler pour assurer le fonctionnement de la chaîne d’approvisionnement.

« On est déjà des clients du train », dit M. Cadieux, donnant l’exemple des opérations connues sous le nom de “piggyback” où des remorques routières sont embarquées sur des wagons ferroviaires lorsque cette collaboration est rentable pour toutes les parties.

Selon lui toutefois, une meilleure communication est cruciale à l’optimisation de cette intégration intermodale, une communication présentement déficiente en raison d’enjeux de concurrence entre modes de transport qui travaillent trop souvent en silos.

« Quand on parle d’optimiser nos mouvements, c’est utile d’avoir du renseignement pour savoir combien on peut traiter de conteneurs à l’heure chez un transporteur ferroviaire. C’est utile de savoir si telle route [ferroviaire] est déjà à 100 % de sa capacité du point A au point B », témoigne le porte-parole de l’ACQ.

« Souvent, les modes ne nous le diront pas. Ils vont nous amener à stocker chez eux et ça partira quand ça partira. Mais si tu le savais qu’ils ne sont pas capables d’en prendre plus et qu’ils arrêtent d’en accepter dans leur cour, peut-être que tu ferais un autre choix. Ils ne veulent pas que tu le saches et ils ne veulent pas que tu le dises aux autres moyens de transport non plus, donc à leurs compétiteurs », se désole M. Cadieux.

Partie remise

On le voit, il reste du pain sur la planche avant que tous les acteurs du monde du transport de marchandise s’entendent sur la marche à suivre pour conjuguer la rentabilité et la durabilité de leurs activités respectives.

Mais ce n’est que partie remise.

 « L’édition 2023 visait à dresser un bilan de la mise en œuvre du plan d’action, à discuter des défis à relever pour l’atteinte des cibles à l’horizon 2030 et à mobiliser les acteurs de la mobilité durable autour de l’élaboration et de la mise en œuvre du prochain plan d’action », nous dit un porte-parole du MTMD à la suite de ce forum, dont ce n’est certainement pas la dernière édition.

Donnez votre avis

Vos données ne seront ni publiées, ni partagées.

*