Perdre ses mauvaises habitudes pour gagner en prévention
Certaines mauvaises habitudes peuvent causer des accidents en milieu de travail. Isabelle Lessard, directrice générale de Via Prévention, a mis en lumière ces habitudes et proposé des moyens de les éliminer dans le cadre de sa conférence La démarche préventive : pour perdre nos vieilles habitudes, présentée lors de la Journée d’industrie de l’Association du camionnage du Québec.
Les mauvaises habitudes :
-Fermer les yeux en présence d’un risque. «On constate un risque mais on ne veut pas le voir, ou on le voit mais on ne veut pas intervenir. Le risque demeure présent parce qu’on ne s’attarde jamais à le corriger», d’expliquer Mme Lessard.
-Ne pas investir en prévention. «Agir en prévention demande parfois des investissements qui, à court terme, peuvent ne pas paraitre rentables. Or, à long terme, les mesures de prévention sont toujours rentables. Si vous pensez que la prévention coûte cher, regardez vos coûts d’accidents. Une étude montre que pour chaque dollar investi en prévention, on a un retour de 3 $.»
-Tolérer des comportements non sécuritaires. «On voit ça assez souvent, comme gestionnaire ou chez un de nos collègues. On est témoin d’un comportement non sécuritaire, mais on hésite à intervenir. On a une responsabilité lorsque l’on tolère un risque.»
-Ne pas utiliser les équipements et les outils à sa disposition. «L’outil ou l’équipement est peut-être rangé à un endroit un peu plus éloigné. L’omission de l’utiliser peut entraîner un accident.»
-Continuer à rouler en présence de signes de fatigue. «Il peut arriver qu’un employé au volant de son véhicule ressente un peu de fatigue, même s’il respecte ses heures de conduite. Il peut mal évaluer son risque en continuant à rouler plutôt que de faire une courte pause pour s’aérer et s’oxygéner.»
-Prendre des raccourcis dans les méthodes de travail pour gagner du temps. «On voit cela souvent. On va grimper sur une table plutôt que d’aller chercher un escabeau qui n’est pas très loin. Ces raccourcis peuvent entraîner des accidents.»
Prévenir un accident n’est pas une démarche naturelle. La prise de risque peut même être valorisée dans certains milieux, en affaires par exemple ou dans les sports. «On ne nait pas préventif, on le devient, et nos actions en prévention vont se heurter à une série d’obstacles», prévient Mme Lessard.
Il faut identifier ces obstacles afin de les éviter, de les contrôler et de rectifier le tir.
Une première catégorie d’obstacle que l’on peut retrouver en milieu de travail, c’est la perception de l’accident. «Pour plusieurs, un accident c’est le résultat du destin. Or, il n’y a pas de fatalité. Au contraire, tout accident est évitable», corrige Isabelle Lessard.
Il y a aussi la perception qu’un accident est l’effet du hasard. «Le seul hasard qui pourrait arriver, c’est d’être frappé par la foudre. Quand un accident survient, on doit enquêter pour éviter que ce type d’accident ne survienne de nouveau.»
Certains cherchent un coupable pour se protéger un peu de leur responsabilité, mais cela n’apporte aucune solution : on doit apprendre pour être en mesure de corriger.
Autre obstacle : l’habitude au risque. Lorsqu’on a été souvent exposé à un risque et que l’on n’a pas eu d’accident, cela donne la fausse impression que l’on n’aura jamais d’accident. «On entend dire : « on procède comme ça depuis des années, et on n’a jamais eu d’accident! ». Mais si on creuse un peu, on découvrira peut-être que l’accident a été évité de justesses une multitude de fois. Qu’on a eu plein de petits signaux dénotant qu’il pourrait arriver un accident plus grave. En réalité, plus l’exposition au risque augmente, plus le risque d’accident augmente», souligne Mme Lessard.
Il peut aussi y avoir un conflit entre la productivité et la sécurité. La non-réalisation d’un impératif de production peut amener un désagrément, par exemple être en retard parce qu’on a pris une mesure préventive. Cela peut conséquemment entraîner des retards de livraison ou des pénalités, des réprimandes ou des sanctions. «Ce désagrément est pratiquement immédiat, alors que l’accident demeure hypothétique. On a donc le choix entre un désagrément immédiat ou un autre très hypothétique. On se trouve donc dans l’obligation de choisir entre productivité et sécurité.»
En conclusion, la démarche préventive doit partir de la haute direction, elle doit être rigoureuse et elle doit être personnalisée à l’entreprise. Il n’y a pas de programme tout fait. Et pour tout accident, il faut enquêter et analyser. «Un accident, c’est toujours multi causal. Il n’y a pas de petits accidents, et chaque accident est important.»
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