Selon le PDG de TFI, l’incertitude liée aux élections américaines aggrave les difficultés du marché du fret

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Le dirigeant de la plus grande entreprise de camionnage du Canada affirme que les prochaines élections américaines pèsent sur un marché du fret déjà faible.

L’incertitude quant à l’issue de la course politique de cet automne fait que certains clients suspendent leurs expéditions jusqu’à ce que le résultat soit clair, a déclaré vendredi Alain Bédard, président et chef de la direction de TFI International Inc.

(Photo : TFI International)

Lors d’une conférence téléphonique avec des analystes, M. Bédard a donné l’exemple d’une société d’énergie verte issue de General Electric, affirmant que les activités de GE Vernova dans le domaine des turbines éoliennes pourraient souffrir en fonction de la personne qui remportera le scrutin du 5 novembre.

«L’un des candidats est contre les éoliennes, donc  l’activité de la société va chuter. L’autre candidat est plus écologiste et il est pour les éoliennes. C’est pourquoi nous avons ce genre de clients qui restent sur le carreau, ne sachant pas où la balle va tomber, soit à gauche ou à droite», a expliqué M. Bédard.

«Nous prévoyons toujours que la récession du fret ne changera probablement pas avant 2025. Nous avons une année électorale aux États-Unis. Beaucoup de nos clients attendent de voir ce qui va se passer.»

GE Vernova n’a pas répondu à notre demande de commentaire.

L’environnement difficile du camionnage en général a également nui aux transporteurs, a affirmé le chef de la direction, ce qui a entraîné une baisse de 7 % en glissement annuel du bénéfice ajusté par action au premier trimestre de TFI, inférieur aux attentes des analystes.

«Pourquoi? Parce que le transport de lots complets au premier trimestre a été un véritable désastre», a-t-il indiqué. «C’est un marché très, très difficile en ce moment.»

M. Bédard faisait référence au segment des «chargements complets» de l’entreprise, qui transportent des charges complètes vers un client, par opposition aux livraisons de «chargements partiels», qui effectuent plusieurs dépôts de marchandises pour différents clients en une seule fois.

L’emploi dans le secteur du camionnage et de la logistique a diminué d’environ 38 000 postes entre 2021 et la fin de l’année dernière, selon l’association à but non lucratif RH Camionnage Canada.

Le Conference Board du Canada a déclaré que l’endettement des ménages entravera les dépenses de consommation cette année, alors que le penchant des Canadiens pour les achats en ligne continue de diminuer après avoir atteint des sommets pandémiques, laissant les expéditeurs dans le pétrin.

M. Bédard a souligné que le non-respect généralisé des lois du travail par certaines entreprises de camionnage a nui à TFI au point qu’il envisage de vendre l’une de ses composantes.

Interrogé par un analyste sur son intention de se défaire de sa division canadienne de transport de lots complets en difficulté, M. Bédard a répondu : «Nous nous posons la question.»

M. Bédard a qualifié le phénomène connu sous le nom de Chauffeur inc. de «cancer» pour les entreprises de camionnage légitimes, car les rivaux qui enfreignent les règles bénéficient d’un avantage concurrentiel.

Chauffeur inc. fait référence à la classification erronée des travailleurs en tant qu’indépendants, ce qui signifie que l’entreprise ne fournit pas d’avantages sociaux ou de protections de base en matière de travail.

«Nos activités au Canada vont absolument se contracter à cause de Chauffeur inc. «Des gens vont perdre des emplois qui sont bien rémunérés chez TFI à cause de la concurrence déloyale.»

La classification erronée des entrepreneurs qui conduisent pour une seule entreprise et ne sont pas propriétaires de leurs camions ou ne contrôlent pas leurs propres horaires est illégal, en plus d’être risqué, car les travailleurs ne bénéficient pas de droits fondamentaux tels que l’indemnisation des accidents du travail, les congés de maladie payés, les heures supplémentaires ou les indemnités de licenciement.

«Ils ne versent aucune indemnité à leurs chauffeurs. C’est vraiment ce qui nous tue», s’est plaint M. Bédard.

Il a ajouté qu’il pensait que les autorités provinciales et fédérales allaient sévir contre les contrevenants, mais il a noté que le problème persistait malgré des années d’avertissements de la part de l’industrie.

Dans le budget fédéral de ce mois-ci, le gouvernement a réitéré son engagement, pris un an plus tôt, de modifier le Code canadien du travail afin de renforcer la protection de l’emploi pour les travailleurs itinérants sous réglementation fédérale. Selon l’Agence du revenu du Canada, cette initiative permettrait de renforcer les interdictions relatives à la classification erronée des employés.

D’autres défis attendent TFI, notamment l’intégration de Daseke Inc.

TFI a conclu l’achat de la société texane de transport par remorques à plateau pour environ 1,1 milliard $ au début du mois, ce qui lui permet d’augmenter de plus de 40% sa flotte composée de plus de 11 000 camions.

«Ce n’est pas un désastre. Ce n’est pas UPS Freight, où ces gens perdaient de l’argent», a affirmé M. Bédard à propos d’une acquisition réalisée en 2021. Il a toutefois critiqué l’ancien siège social de Daseke : «Ces gens-là coûtaient une fortune et les résultats n’étaient pas au rendez-vous.»

En août dernier, TFI a fait l’acquisition de JHT Holdings. Cette acquisition a entraîné une hausse de 24 % des recettes du secteur logistique de TFI d’une année sur l’autre, soit le seul secteur à avoir connu une augmentation au cours du dernier trimestre.

Malgré ses acquisitions (six au cours des 12 derniers mois) le bénéfice net a chuté de 17 % d’une année sur l’autre pour atteindre 92,8 millions $ au cours du trimestre qui s’est terminé le 31 mars. Les recettes ont légèrement augmenté de 1 % pour atteindre 1,87 milliard $.

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