Chauffer ou climatiser sa cabine à moindre coût

Pour un camionneur professionnel, la cabine est un sanctuaire où le confort est essentiel. Été comme hiver, il veut récupérer de sa journée de travail sans souffrir de la chaleur, du froid ou du bruit. Pour le transporteur, le désir de réduire ses coûts en carburant est aussi prioritaire. En ajoutant les contraintes légales qui limitent l’usage de la marche au ralenti au strict minimum, un appareil de chauffage/climatisation d’appoint ou un groupe auxiliaire de bord (APU) est une option à considérer.

Avec un APU, le chauffeur peut profiter de ses appareils sans faire fonctionner la marche au ralenti de son camion. Photo: Istock.

Les contraintes légales

Pour réduire la pollution atmosphérique et toutes les conséquences qui y sont rattachées (santé pulmonaire, problèmes cardiaques, cancers), plusieurs États en Amérique du Nord ont imposé, depuis deux décennies déjà, des limites variables à la marche au ralenti. Aux États-Unis, par exemple, dix États limitent la marche au ralenti entre trois à cinq minutes pour la plupart des véhicules.

Le National Conference of State Legislatures mentionne également, dans un document nommé LegisBrief, que 14 États ont ciblé les autobus scolaires, les camions de plus de 10 000 lb et les véhicules qui sont la propriété des États. Il y a, enfin, 18 autres législatures qui ont préféré les incitatifs financiers à la contrainte légale: prêts, projet-pilote ou crédit de taxe sont offerts aux flottes afin de leur permettre d’adopter des technologies d’appoint.

Plus près de nous, la Ville de Montréal a adopté un règlement qui limite, pour les véhicules lourds, la marche au ralenti à cinq minutes par tranche de 60 minutes et à 10 minutes lorsque la température est inférieure au point de congélation. Il est possible, lorsque la température est inférieure à -10 degrés Celsius, de laisser tourner le moteur lorsqu’il y a quelqu’un à l’intérieur.

Ça c’est la base. Mais il y a encore mieux.

Les options technologiques

Pour maitriser les éléments et permettre un confort optimal au chauffeur, l’industrie propose des solutions qui vont de la simple chaufferette d’appoint qui pousse de l’air chaud (ou froid) à l’APU qui génère en plus de l’énergie afin d’alimenter les appareils lorsque le moteur ne tourne pas – ce qu’on appelle les « hotel loads ».

Entre les deux, il y a des systèmes hybrides qui peuvent combiner, à différents degrés, certaines fonctions qu’on retrouve dans un appareil ou l’autre. Dans tous les cas, c’est le diesel ou la batterie électrique qui alimente le fonctionnement.

Évidemment, le prix payé sera déterminé par la complexité de l’appareil choisi. D’une chaufferette à l’APU, on peut passer approximativement de 2 000$ à 15 000$ l’unité. Il faut donc bien évaluer l’utilisation qui en sera faite avant d’investir.

Mettre un frein définitif à la marche au ralenti

Chez Pepsi Cola, « la marche au ralenti est limitée entre une et trois minutes seulement sur pas mal tous nos camions, » me confirme un chauffeur montréalais de la compagnie qui préfère garder l’anonymat. Une fois éteint, le moteur du camion laisse la place au système de chauffage d’appoint Webasto, lequel chauffe la cabine « si le camion reste immobilisé plus de 20 minutes durant la saison froide, » précise mon chauffeur.

«Il s’agit d’un chauffe-moteur alimenté au diesel branché directement sur le réservoir du camion, précisent Don Kanneth et Daniel Erck de Webasto. Il est silencieux et peut offrir une chaleur plus concentrée que la marche au ralenti classique.»

Plus complexes, plus volumineux et plus coûteux à l’achat que les systèmes de chauffage d’appoint, les APU – souvent appelés «génératrice » – fournissent, en plus du chauffage, l’énergie nécessaire pour faire fonctionner les appareils électriques dans le compartiment couchette (téléviseur, micro-ondes, cafetière) sans faire tourner le moteur au ralenti.

On peut donc chauffer une cabine, pour une période maximale de 22 heures, avec l’équivalent de un gallon US (3,785 litres) de carburant.

Le système 200 STC de Webasto, lui, est plus précisément un système de chauffage autonome de couchette (nommé le Standalone bunk heater, une marque de commerce de la compagnie). Un appareil indépendant du moteur de camion qui permet aussi, dit M. Kanneth, de brancher ses appareils électroniques fonctionnels.

Réduire ses coûts

« Pour 20 heures de chauffage de la cabine, par exemple, le modèle STC 2000 va consommer 0,189 litre à l’heure », précise M. Erck. La performance sera moindre si le chauffeur utilise l’appareil pour faire fonctionner micro-ondes, téléviseur et ordinateur pour regarder des films.

« Ce qui veut aussi dire qu’un chauffeur, si son camion est en panne en plein hiver, peut rester bien au chaud en attendant les secours. Tout ce que ça lui prend, c’est une batterie 12 volts chargée et du diesel dans le réservoir, » précise M. Erck.

Des données de performance qui sont confirmées par Nicolas Henri. Gestionnaire de flotte pour Transport Grayson, M. Henri voit cependant des avantages qui vont au-delà de la seule économie de carburant:

« Pour le chauffage, les gars ne veulent plus utiliser le idle. Trop de bruit et de vibrations. La chaufferette Espar D4 d’Eberspächer qu’ils utilisent est silencieuse, économique et fiable. Les chauffeurs adorent ça. »

Chez Thermo King, le l’APU Tripac au diesel permet de chauffer et de refroidir la cabine et peut aussi faire fonctionner les appareils du routier lorsqu’il est en période de repos, indique Jocelyn Ménard, directeur de comptes majeurs chez Thermo King Est du Canada. On peut aussi en augmenter l’efficacité en y combinant les panneaux solaires du fabricant.

En ce qui a trait à la climatisation, Nicolas Henri précise que le Nite System, que Grayson a privilégié pour mettre dans ses cabines, « est équipé de quatre batteries 12 volts procurant une autonomie de huit à 10 heures, qui se rechargent pendant que le camion roule, qui fonctionnent sans bruit et dont la durée de vie est d’à peu près deux ans, deux ans et demi. »

Un retour sur investissement rapide

Avec le confort que le silence procure au chauffeur et le respect des normes juridiques, le retour d’investissement (RI) est l’aspect qui, en le jumelant à une réduction notable de ses émissions de gaz à effet de serre (GES), est le plus important pour un transporteur et un voiturier remorqueur.

Un RI qui ne peut être possible que si l’économie de carburant est suffisante à court et moyen termes pour absorber les coûts d’achat, d’installation et d’entretien d’une chaufferette classique, hybride ou d’un APU.

Et d’après les chiffres que nous lui présentons, Nicolas Henri opine du bonnet: « Consommer quatre litres à l’heure lorsque le moteur est au idle, cest un chiffre raisonnable. »

Pour avoir un portrait global, on doit multiplier ce chiffre par le nombre d’heures – entre huit et dix par nuit. Daniel Erck précise alors « que ça coûte, en moyenne, 3$ US par nuit avec un système de chauffage d’appoint 2000 STC, au lieu de 60$US pour huit à dix gallons US de diesel brûlé avec la marche au ralenti ».

Même son de cloche chez M. Ménard. « Mes clients me disent que ça leur coûte entre 50$ et 65$ de carburant par nuit avec le idle. En utilisant le Tripac, le coût à l’heure est de 0,16 gallon US. »

Sur vingt jours de travail mensuellement, l’économie peut atteindre, selon le prix du diesel et l’utilisation qui est faite de la chaufferette, 800$ par mois et entre 6 000$ et 7 000$ annuellement. M. Ménard mentionne jusqu’à 12 000$ d’économies par année en carburant si le chauffeur se sert d’un Tripac 250 jours par année.

Le RI peut donc se faire en quelques mois ou quelques années seulement, selon le ou les modèles choisis. Pour un modèle de chaufferette d’appoint standard, le retour arrivera plus vite que pour un APU plus cher. M. Ménard précise qu’avec un APU, il faut « deux ans, deux ans et demi pour prendre le chemin de la rentabilité. »

Une chose est certaine: le prix du carburant, dit l’American Transportation Research Institute (ATRI) dans un sondage publié en octobre, est au somment des préoccupations des membres de l’industrie.

Rédacteur professionnel depuis plus de 15 ans, Christian possède une expérience considérable à titre de journaliste spécialisé en transport, notamment à titre de directeur de la rédaction de L'Écho du transport, magazine aujourd'hui disparu, et de Transport durable magazine.

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