COVID-19: Québec refuse d’accorder un délai pour le paiement des immatriculations

Malgré ce qui semble être un compromis temporaire, les entreprises de camionnage du Québec n’ont pas obtenu le sursis qu’elles demandaient pour le paiement des immatriculations qui arrivaient à échéance le 1er avril.

En pleine crise sanitaire et économique, le gouvernement du Québec n’a pas voulu accommoder ceux qu’il qualifiait de héros il y a quelques jours à peine et leur accorder le même report dont bénéficient les chauffeurs de taxi et les propriétaires de véhicules dits commerciaux (plaqués F).

Marc Cadieux, président-directeur général de l’Association du camionnage du Québec, encaisse mal le coup. «On avait demandé un peu d’oxygène pour aider à garder nos flottes entières. C’est sûr qu’il y a une réaction de non compréhension de notre industrie», a-t-il commenté. «On nous qualifie de héros, mais on nous lance le message que le transport des aliments et des articles de santé n’est pas d’une importance significative face aux plaques T et F.»

Dans un courriel, l’attachée du ministre Bonnardel, Florence Plourde, a écrit que le Ministère estime que d’autres secteurs de l’industrie des transports sont plus durement touchés.

«Bien que le transport de biens essentiels soit priorisé actuellement, plusieurs autres secteurs de l’économie continuent d’utiliser le camionnage, notamment pour la livraison des ventes qui se font en ligne. Nous avons voulu répondre aux enjeux les plus urgents, soit ceux de l’industrie du taxi ainsi que des transporteurs commerciaux.» Elle ajoute que Québec est «conscient des défis rencontrés par l’industrie» et reste «en communication tous les jours avec ses représentants».

Express Mondor a pris la décision de remiser plus de la moitié de sa flotte, soit 55 de ses 100 tracteurs routiers. L’entreprise de Lanoraie œuvre principalement dans le secteur de la construction et des exportations vers les États-Unis avec des remorques plateau, des secteurs mis sur pause par le gouvernement jusqu’au 13 avril au moins.

Éric Mondor, président d’Express Mondor

«J’ai gardé 45 camions immatriculés. Je prends la chance que les affaires reprennent le 13 avril comme promis sinon, j’aurai fait ça pour rien, et je devrai remiser d’autres camions le 30 avril si ça ne repart pas», nous a confié Éric Mondor, président d’Express Mondor.

Il n’y a pas que la flotte de Mondor qui a diminué. Le garage aussi. Alors que l’entreprise comptait 25 mécaniciens avant la crise, elle n’en engage maintenant que trois.

Tout est une question de liquidités. Des entreprises manufacturières ont mis la clé dans la porte, réduisant de façon importante les volumes à transporter. Et impossible de dire combien de temps les recevables vont traîner. «Même si j’envoyais des factures maintenant, dans combien de temps seraient-elles payées? Les entreprises sont fermées», explique Éric Mondor. «Quand on mange au restaurant ou qu’on fait le plein, on paye sur-le-champ. On ne dit pas qu’on va revenir dans 60, 90 ou 120 jours. Nous, on doit supporter ces recevables.»

M. Mondor reconnaît qu’il pourrait offrir ses services à des compagnies à la recherche de capacité, comme les distributeurs alimentaires, mais ce serait «comme demander à un joueur de hockey d’aller jouer au soccer. Ils ont leur spécialité, et on a la nôtre».

Remiser la moitié de sa flotte lui donnera accès à quelque 15 000 $ de liquidités par mois. En enlevant les assurances sur ces mêmes camions, il récupère un autre 35 000 $ par mois. Ces liquidités aideront à payer les chauffeurs, le carburant et les autres frais.

«Les assurances sont vraiment correctes avec nous. Les banques aussi, elles nous supportent pas à peu près», souligne le président d’Express Mondor.

«M. [François] Legault fait une excellente job. Il a dit que nous sommes des héros, mais il n’a pas fait descendre le message jusqu’à la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) apparemment», déplore Éric Mondor. «On demande juste un répit et on ne nous le donne pas, alors on le prend nous-mêmes en remisant des camions. Mais cela veut aussi dire, malheureusement, mettre des chauffeurs à pied.»

Malgré tout, le moral des troupes reste bon et les employés sont compréhensifs, se réjouit le patron de Mondor. «J’ai enlevé ma cravate et j’ai mis mes Kodiak. Je parle beaucoup à mes chauffeurs, ils ne lâchent pas.»

N’empêche qu’il se demande pourquoi la SAAQ a accordé un sursis à l’industrie du taxi, qu’il respecte au plus haut point, mais pas à l’industrie du camionnage qui offre aussi un service essentiel. «C’est deux poids deux mesures, selon moi», conclut-t-il.

Steve Bouchard écrit sur le camionnage depuis près de 30 ans, ce qui en fait de loin le journaliste le plus expérimenté dans le domaine au Québec. Steve est le rédacteur en chef de l’influent magazine Transport Routier, publié par Newcom Média Québec, depuis sa création en 2000. Il est aussi le rédacteur en chef du site web transportroutier.ca et il contribue aux magazines Today’s Trucking et Truck News.

Steve rédige aussi le bulletin électronique de Transport Routier, Les nouveautés du routier, et il participe à l’élaboration des stratégies de communication pour le salon ExpoCam de Montréal, propriété de Newcom.

Steve est détenteur d’un permis de conduire de classe 1 depuis 2004 et il est le seul journaliste de camionnage au Québec à avoir gagné des prix Kenneth R. Wilson de la Presse spécialisée du Canada, l’or et l’argent deux fois chacun.

Steve a occupé la présidence et la présidence du Conseil du Club des professionnels du transport du Québec et il représente les médias au comité des fournisseurs de l’Association du camionnage du Québec. En 2011, il a reçu le prestigieux prix «Amélioration de l’image de l’industrie» remis par l’Association du camionnage du Québec.

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