La machine c’est le camion… pas le camionneur

OPINION

Les camionneurs sont le cœur de l’industrie du transport. Sans eux, toute la chaîne d’approvisionnement du pays serait paralysée. En contrepartie, le citron se presse de plus en plus envers leurs conditions de travail.

Le 28 septembre dernier, l’Alliance canadienne du camionnage (ACC) leur demande — encore — un sacrifice supplémentaire avec l’arrivée de la loi C-3 qui entrera en vigueur le 1er décembre 2022. Cette loi prévoit 10 jours de congé de maladie payés annuellement, pour tous les camionneurs régis par la loi fédérale. Ainsi, l’ACC demande au gouvernement fédéral de retarder de deux ans l’entrée en vigueur complète de la loi.

Photo: Christian Bolduc
Kareen Lapointe (Photo: Christian Bolduc)

L’ACC fait état des difficultés auxquelles ses membres sont confrontés avec la pénurie de main-d’œuvre qui ne cesse de croître. Ce projet de loi, selon M. Stephen Laskowski, président de l’ACC, pourrait «équivaloir à l’immobilisation de 300 000 camions pendant 10 jours […]». Il ajoute que le « principal coût pour les entreprises […] c’est le camion qui doit rester des jours dans la cour et le chaos logistique que cela entraîne pour l’entreprise de camionnage qui se démène pour le faire bouger».

Ensuite, l’ACC se préoccupe de la rupture de la chaîne d’approvisionnement. M. Laskowski s’inquiète « que les effets sur l’expédition juste-à-temps, la capacité globale, la disponibilité saisonnière et la fiabilité du service pour les clients et les canadiens soient graves».

Finalement, le fameux dossier des Chauffeurs inc. Comme ces employés sont classés à tort comme travailleurs indépendants donc, ne sont pas couverts par cette nouvelle mesure, l’ACC craint « que l’une des principales conséquences prévues soit de pousser encore plus d’entreprises et de chauffeurs dans l’économie souterraine».

La machine c’est le camion… pas le camionneur. M. Laskowski, il faudrait cesser de voir seulement l’impact économique dans votre vision du « camionneur ». Ce sont avant tout des humains derrière le volant qui, comme vous et moi, ont à l’occasion, des problèmes de santé personnels, des enfants malades ou même, des rendez-vous médicaux. Malheureusement, la maladie ne s’invite pas que le samedi et dimanche, elle se moque du « just-in-time »

Aussi, si vous recueillez quelques commentaires auprès des camionneurs, vous constaterez assez rapidement que ceux-ci quittent le métier par manque de reconnaissance. Ne serait-il pas une marque de remerciement de leur offrir, ce qui devrait être un minimum au niveau des conditions de travail, la possibilité de prendre soin de leur santé ? Ne pensez-vous pas qu’un chauffeur qui se sent apprécié par son entreprise continuera d’évoluer au sein de celle-ci ?

Malheureusement, la maladie ne s’invite pas que le samedi et dimanche, elle se moque du « just-in-time »

Et pour les Chauffeurs inc., la faute revient avant tout aux dirigeants des entreprises qui acceptent ces pratiques. C’est à l’ACC que revient le devoir de sensibilisation et de surveillance à faire auprès de ses membres. Bref, cet argument ressemble à une menace voilée pour que le gouvernement vous prenne au sérieux.

Je conclurai avec une suggestion pour l’ACC et M. Laskowski. Comme vous représentez sept grandes associations provinciales, dont l’Association du camionnage du Québec, et que le Québec est majoritairement composé de francophones, pourquoi l’Alliance canadienne du camionnage ne rend donc pas son site internet disponible dans les deux langues officielles ? Il serait tout à votre honneur, par politesse et respect, de donner une chance égale au moteur de l’industrie, c’est-à-dire les camionneurs, de pouvoir consulter vos communiqués de presse dans la langue de Molière.

Kareen Lapointe

Présidente, SSPT Camionneurs

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  • Mon ami vient de finir sa saison de camionnage avec deux avc. Après travailler en moyenne 100 yrs par semaine et souvent se coucher sans souper car tous les restos sont fermés après 22 hrs et que sont lunch est gâté à cause de la chaleur intense. Il n’a même pas eu une carte de prompt rétablissement. À deux reprises il a rencontré les boss pour leur faire par de sa santé et qu’il ne se sentait plus capable de faire autant d’heures, ils n’ont rien fait pour améliorer sa situation.